Sous la pluie, le vent et parfois le soleil, dans la boue, l’herbe trempée ou sur le bitume, de curieux personnages a l’air plus ou moins inspiré se relaient régulièrement pour prendre les dimensions de certains arbres et façades végétales ; ils réfléchissent devant une souche ou un tas de fumier encore jaune, ils immortalisent une mare, un puits restauré, un dragon de bois coincé en haut d’une palissade comme une herbe entre les dents, ils lèvent le nez d’un ton grave vers le haut des (mini) falaises… On trouve ces poètes de la nature le long des orées, des bosquets, des prairies à l’anglaise ou des champs, on les voit déambuler au milieu des chemins communaux… Nous avons croisé la responsable d’une œuvre collective, Nathalie Périer.
Propos recueillis en substance
Bonjour Nathalie Périer, est-ce que tu peux te présenter ?
Je m’appelle Nathalie Périer, je suis artiste plasticien et professeur d’arts plastiques et de dessin de la MJC de Sens depuis une trentaine d’années. Nous sommes hébergés dans une salle municipale de Gron. J’ai des élèves de 7 à 80 ans, certains me suivent depuis 20 ans; ces personnes ont besoin de pratiquer pour le lien social, pour s’exprimer, découvrir ses compétences, ses capacités…. J’ai initié des expositions collectives et individuelles dans le secteur et ailleurs. Pour Chemins d’Artistes, j’interviens en tant qu’accompagnatrice encadrante et animatrice technicienne.
Décris-nous tes coups de cœur sur les Chemins d’Artistes
Mon premier coup de cœur a été une orée, en partant du GR. On avait une belle courbe et de hautes branches le long du chemin, c’était très beau. Nous avons passé un petit gué, avec un ru, et il y avait une montée pour arriver un grand arbre – un chêne ? – au milieu des acacias. Nous avons pris des repères et avons continué nos pérégrinations jusqu’à un 2e bosquet, plus protégé, nettoyé au sol, assez accueillant, même si je me suis pris les pieds dans une racine… la nature peut être piégeuse ! Lorsque nous sommes revenues quelques jours plus tard pour finir le parcours, nous avons découvert une autre orée avec le lieu idéal pour notre œuvre collective. A l’intérieur de ce bois, il y avait une petite clairière avec de très beaux chênes, une dizaine, peut-être ? Et nous nous sommes senties très bien, et à l’abri de ce vent à décorner les bœufs (70 km/h). C’est à cet endroit que nous aimerions faire notre installation.
Quel est ton projet artistique pour Chemins d’artistes ?
J’ai initié un projet en le soumettant à mes élèves ; c’est un travail en commun, une installation de plusieurs éléments, nous travaillons sur du collectif avec des échanges de pratiques et du respect de l’autre dans ce qu’il propose. L’idée n’est pas de créer une œuvre issue des matériaux trouvés sur place, mais d’exprimer sur intissé comment l’on ressent cette nature en devenir : quel souvenir on peut en avoir ? quelles sont les images qu’il nous reste dans la rétine une fois l’hiver passé ? comment la végétation va exploser avec le printemps ? comment c’était dans les années passées ? comment ça sera dans le futur ? Ce qui est important, c’est que des élèves sont venus sur site pour découvrir les lieux possibles, s’en imprégner. Ce partage, en plus du travail à l’atelier, est intéressant.
Qu’est-ce qui t’a séduit dans la 2e édition de Chemins d’artistes ?
La proposition de faire participer un groupe à une manifestation publique, de sortir de l’atelier, de montrer son travail. Nous avons déjà fait des installations à plusieurs reprises dans des parcs, à Gron aussi… Avec Chemins d’artistes, c’est intéressant de se confronter à d’autres œuvres en tant que collectif de personnes qui ne sont pas forcément artistes elles-mêmes, mais qui pratiquent depuis plusieurs années… Nous suivons une ligne directrice, nature et culture. La culture, on peut prendre ce terme au pied de la lettre, la forêt cultivée, la forêt pas cultivée, la forêt qui sert à nous chauffer, à nous meubler, mais aussi la forêt qui sert à nous faire rêver.
Nathalie Périer au Nid des Chênes © Majo