Le Pôle d’Equilibre Territorial et Rural du Nord-Yonne (PETR) dont font partie les communes du territoire du Ruban Vert a en charge l’élaboration du Schéma de Cohérence Territorial (SCOT).
L’association met en débat un projet pour notre territoire, qui pourrait, s’il fait consensus, être intégré au SCOT et prendre existence.
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PROJET DE TERRITOIRE DU RUBAN VERT
1. Contexte et objectifs de ce document
L’association Le Ruban Vert s’est donné pour objectif de promouvoir, préserver et restaurer la biodiversité dans le corridor de biodiversité joignant la forêt d’Othe aux bois et étangs du Gâtinais. Cette zone recouvre à peu près le territoire des communes de Villeneuve-sur-Yonne, Bussy-le-Repos, Rousson, Marsangy, Piffonds, Chaumot, Egriselles-le-Bocage, Cornant, Savigny-sur-Clairis, Vernoy et Villeneuve-la-Dondagre.
Ces communes sont traversées par un corridor écologique matérialisé dans le SRCE de l’Yonne comme corridor interrégional de biodiversité. Elles contiennent aussi quatre éléments de la trame bleue : l’Yonne dans la partie entre Saint-Julien du Sault et Etigny, le rû de Bourienne (Rousson, Chaumot, Bussy-le-Repos), le Montgerin (Marsangy, Egriselles le Bocage, Cornant) et la Clairis qui prend sa source à Villeneuve-la-Dondagre avant de rejoindre le Loing par le Sud-Ouest.
La notion de continuité écologique répond en particulier au besoin d’adaptation de la biodiversité au changement climatique, qui crée de lourdes incertitudes dans cette région considérée comme largement vouée à la sécheresse, n’étant pas alimentée par des glaciers ou des massifs montagneux (voir travaux de l’IPSL). La circulation des espèces accompagnera celle des habitats, et il paraît important de préserver autant que possible une occupation du sol plus large que le corridor stricto sensu, qui permette la migration d’habitats complets viables et d’écosystèmes plus que de quelques animaux.
Ceci est d’autant plus vrai que la nature dans le Nord de l’Yonne est déjà sous forte pression, avec une biodiversité assez dégradée, du fait de la proximité de la région parisienne qui stimule la croissance de Sens et crée une pression à la construction d’habitats pour des personnes travaillant en région parisienne ou à Sens. C’est aussi le Sud de la Brie, avec une agriculture céréalière dédiée de plus en plus aux grandes cultures (colza blé orge) ; enfin, cette région est parcourue par des infrastructures linéaires nombreuses : trois autoroutes, deux lignes de train, de nombreuses lignes à haute tension.
L’enjeu est donc de ne plus perdre de biodiversité dans le Nord du département, de laisser des espaces de liberté à la nature notamment pour lui permettre de s’adapter au changement climatique et de laisser des espaces de qualité de vie pour les habitants du territoire.
Si l’on regarde non pas le SRCE régional mais la trame verte et bleue nationale composée des différents schémas régionaux, il apparaît important de construire des corridors interrégionaux. Notre corridor s’inscrit dans cette logique.
C’est pourquoi le Ruban Vert propose un projet de territoire couvrant à peu près l’intégralité des communes ci-dessus : il concerne approximativement les territoires des communes situés entre la D103-D149-D15-D149 (Savigny-sur-Clairis à Saint-Julien du Sault) au Sud, les bois de Bléry et les Fouquereaux à l’Ouest, les D63-D70-D72 de Villeneuve la Dondagre à Collemiers,Gron et Etigny, l’Yonne à l’Est (et au-delà sur la commune de Villeneuve sur Yonne), où il pourrait être étendu jusqu’à la forêt d’Othe. C’est ce territoire qui est recouvert dans le document ci-après par l’appellation « le corridor ».
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Ce territoire est à cheval sur deux communautés de communes : la Communauté de Communes du Bocage Gâtinais, et la Communauté d’Agglomération du Grand Sénonais. C’est pourquoi nous souhaitons qu’il puisse être intégré au processus d’élaboration du SCOT du PETR du Nord-Yonne, ainsi qu’aux procédures de PLUI de ces deux communautés, débattu par les parties prenantes intéressées et intégré à ce SCOT puis aux documents d’urbanisme de façon cohérente.
Ce document constitue une proposition pour l’occupation et la gestion de ce territoire par les collectivités publiques, propriétaires et exploitants localisés dans ce périmètre. Il vise à un développement dans lequel la priorité est donnée à la biodiversité, mais qui devrait être économiquement viable pour les acteurs locaux, voire créer une valorisation du territoire selon des logiques et modèles économiques innovants.
Ce projet est présenté en quatre sous-projets, correspondant à peu près aux milieux : agriculture, eau, forêts et occupation humaine.
2. Inventer les bocages de demain : pour un projet alimentaire territorial
Ce territoire est essentiellement agricole et artisanal, hormis quelques industries implantées dans la vallée de l’Yonne : carrières, usines de Rousson et Villeneuve sur Yonne, port de Gron avec les Moulins Dumée (hors du corridor), serres industrielles.
Le projet est fondé sur le maintien de cette vocation rurale, avec toutefois une orientation plus propice à la biodiversité que celle des pratiques agricoles actuelles, pour l’essentiel orientées vers les grandes cultures céréalières. Il s’agit donc d’inventer le « bocage de demain » :
– forme agricole favorable à la biodiversité spontanée,
– milieu ouvert,
– forme privilégiée de la polyculture,
– trame pour la circulation des espèces végétales et animales.
Bocage de demain car il ne s’agit pas de revenir aux siècles passés mais d’introduire les nouvelles connaissances agronomiques et les nouveaux moyens de relier demande des marchés locaux et production.
Il est proposé, compte tenu de l’importance des zones urbaines voisines, d’axer le projet autant que possible autour d’un projet alimentaire territorial, où l’agriculture évoluerait pour satisfaire en priorité les besoins locaux. Les services de restauration collective des communes locales peuvent être de premiers clients pour les produits issus de ce projet, et apportant si possible des garanties de revenu permettant une prise de risque agronomique par les agriculteurs.
2.1. Des initiatives innovantes
Plusieurs agriculteurs sont déjà engagés dans des pratiques agricoles innovantes visant la réduction des intrants et des labours : semis sous couvert, agriculture sans labour, maraîchage biologique, agriculture céréalière biologique, vergers conservatoires, polyculture, petit élevage bio… Ils devraient être encouragés à poursuivre cette transition, par exemple par des garanties d’achat de leur production par les grands acteurs locaux (restauration collective), sous certaines conditions.
De plus, plusieurs agriculteurs cultivent selon le cahier des charges CRC destiné à l’alimentation infantile, qui limite strictement les intrants.
Il est proposé que les acteurs influents de l’agriculture, DRAAF, Chambre d’Agriculture, coopératives, favorisent le projet de territoire, en adaptant systématiquement en ce sens leurs politiques et activités.
2.2. Polyculture, agroécologie, vergers conservatoires, agroforesterie
Etre un corridor de biodiversité suppose néanmoins un changement plus général que des actions ponctuelles, puisque par exemple oiseaux et petite faune dépendent de ressources alimentaires qui n’existent qu’en faibles quantités si l’agriculture industrielle est dominante. Le projet de territoire serait
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donc orienté dans le sens d’une nouvelle polyculture et d’un bocage favorable à la biodiversité et à une protection plus naturelle des cultures (par exemple rapaces détruisant les petits rongeurs, chauve-souris certains insectes), progressivement bien entendu et en coopération avec les acteurs locaux.
Plusieurs initiatives existent déjà ou pourraient se manifester dans cette direction. Elles devraient être favorisées. De nombreuses expériences dans d’autres territoires (près de Reims, près d’Orléans,…) démontrent aujourd’hui la viabilité écologique, agricole et économique de pratiques permettant de maintenir la richesse des sols en matière organique.
La présence de quelques élevages (chevaux, bovins, volailles, cochons, chèvres) est encourageante en ce sens ; une évolution vers davantage de polyculture pourrait être encouragée.
La demande actuelle en matière organique et bois devrait permettre de valoriser la plantation de haies bien gérées (têtards,…) formant bocage, notamment dans les zones de polyculture. Les haies peuvent aussi freiner le ruissellement des eaux et éviter des inondations lors de fortes pluies (Villeneuve-sur-Yonne 2016). Elles sont enfin favorables à la chasse, servant d’habitat à la petite faune.
Il est proposé que les Aires d’Alimentation de Captage, nombreuses et importantes dans notre territoire (voir ci-dessous), soient les premières dans lesquelles ces pratiques soient encouragées et généralisées. Le souci de la qualité de la ressource permettrait sans doute, à l’instar de ce qui est fait dans l’AAC de la Vanne, de contribuer à l’équilibre économique de ces nouvelles formes d’exploitation agricole.
2.3. Vigne et apiculture : le retour ?
Le changement climatique permet d’entrevoir le retour d’un climat propice à un vin de qualité. Compte tenu de la proximité de grands crus (Chablis, …), il est proposé de favoriser le retour de telles cultures de vignes sur les pentes bien exposées, en agriculture biologique ou biodynamie qui permet aujourd’hui de bien valoriser la production.
L’apiculture pourrait redevenir plus prospère, si l’ensemble du corridor était à terme converti à ces nouvelles pratiques agricoles. Elle est traditionnelle dans cette région, s’est affaiblie avec la disparition des cultures de sainfoin, mais l’abondance de robiniers-faux acacias dans les forêts locales donne un miel d’acacia très apprécié. Il pourrait être collectivement valorisé, à l’instar des actuels miels urbains. L’apiculture est d’autant plus précieuse que l’abeille est une espèce sentinelle : une apiculture propère est un signe de bon état de la biodiversité.
2.4. Gestion foncière à conduire par la SAFER en ce sens
Les évolutions mentionnées ci-dessus ne sont envisageables que si la SAFER les intègre dans sa politique foncière. Il est ainsi proposé que, s’agissant de notre corridor, la SAFER donne la priorité dans ses choix à trois actions prioritaires (dans cet ordre) :
2.4.1. Echanges de terres pour préserver les AAC,
2.4.2. Agriculteurs locaux volontaires pour les changements de pratiques ci-dessus
2.4.3. Jeunes agriculteurs voulant initier des pratiques innovantes dans l’esprit ci-dessus.
3. Préserver les ressources en eau et les zones humides
Le Ruban Vert est une zone de têtes de bassins versants de plusieurs cours d’eau : Montgerin, rû de Bourienne, Clairis, Orvanne, Lunain… Malgré la perturbation apportée par l’autoroute A19, c’est une zones de plateaux argileux contenant de nombreux réservoirs et zones humides, avec des mares, des sources, des écoulements intermittents et des nappes sous les massifs forestiers qui constituent une véritable richesse. Ceci amène à plusieurs demandes :
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3.1. Connaissance et protection du patrimoine des zones humides
Nous demandons que soient identifiées et préservées les parties exceptionnelles de ce patrimoine, par acquisition ou par voie réglementaire, arrêtés de biotope ou servitudes pour protéger les mares à triton crêté, les rus forestiers non dégradés, les zones de résurgence,…
Le Conseil Départemental de l’Yonne pourrait classer les aires d’alimentation de captages ainsi que les alentours des sources des différentes rivières dans ses Espaces Naturels Sensibles, permettant d’assurer cette protection.
3.2. Protection des nappes et sources
Compte tenu des risques de sécheresse qu’entraînera le changement climatique (pluviosité réduite de 30 à 40% dans quelques dizaines d’années), il faut protéger le patrimoine stratégique que constituent les nappes souterraines et toutes les zones de sources.
Plusieurs AAC(AAC des captages de Saint-Hubert, Brassy, Fontaine Rouge, Vernoy) concernent le territoire, et appellent des changements de pratiques agricoles sur lesquelles travaille la Chambre d’Agriculture avec les agriculteurs concernés. Il est envisagé de poursuivre ces évolutions et de les compléter par la plantation de haies bocagères favorables à la chasse, la biodiversité et la migration des habitats. L’existence de ces AAC devrait permettre de trouver un modèle économique pour contribuer à la viabilité économique de ces changements grâce à l’AESN dont relève le territoire. L’exemple de la protection des zones de captage d’Eau de Paris autour de la Vanne est un exemple inspirant.
Il ne semblerait pas anormal que, comme le fait Eau de Paris dans le bassin d’alimentation de captage de la Vanne, les utilisateurs des eaux de ces nappes pompées, c’est-à-dire les deux communautés de communes concernées, supportent le coût de la transformation des pratiques agricoles dans les zones de captage. Le coût de cette transformation sera de toute façon significativement inférieur à celui du traitement des eaux captées, de plus en plus lourd, et aura l’avantage de profiter aussi aux autres espèces que l’espèce humaine, qui ne bénéficient pas de stations d’épuration de l’eau qu’elles absorbent !
3.3. Mettre en valeur le patrimoine lié à l’eau
Nous souhaitons que soit mis en valeur le patrimoine commun que constituent ces zones humides en recréant du lien avec la population via différents usages : pêche, promenade, lieu de partage, animations, connaissances, observation de la faune et de la flore,…
L’entretien de ces zones humides devrait être adapté pour maintenir des habitats propices à la biodiversité : saisonnalité des entretiens, pas de coupes rases, d’élagages ou de désherbages radicaux favorables à la percée des espèces invasives,…
Ceci est d’autant plus vrai que le corridor est traversé par la « trame blanche », couloir de migration des grues, qui y ont leurs repères, et ont besoin de se poser en zones humides.
Enfin, la mise en valeur du patrimoine passe par celle des ouvrages construits le long de ces cours d’eau : moulins et lavoirs constituent un patrimoine original ; même si à certains endroits on reconstitue le cours naturel des ruisseaux, il pourrait être envisagé de remettre en service certains moulins – avec les précautions appropriées pour la biodiversité.
4. Forêts
4.1. Gestion favorable à la biodiversité dans contrat ONF, selon les recommandations MNHN si possible
Le MNHN/SPN a fait en 2013 un inventaire de la biodiversité dans la forêt du Legs Thénard.
Il est ici proposé que :
– le Legs Thénard intègre ces recommandations dans le contrat de gestion avec l’ONF, à l’exception de la réserve biologique intégrale pour laquelle existent des alternatives ;
– le Legs Thénard définisse une zone de test et des pratiques modifiées pour une gestion alternative plus favorable à la biodiversité ; nous sommes à sa disposition pour y contribuer ;
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– les collectivités publiques propriétaires de bois dans le corridor intègrent également ces recommandations dans leurs pratiques de gestion ;
– les collectivités recommandent aux propriétaires privés d’adopter les mêmes pratiques.
4.2. Forêt privée
Il est ici proposé que les autorisations de déboisement (lorsqu’elles sont nécessaires) prennent en compte la biodiversité, et que les coupes à blanc soient interdites.
4.3. Espaces boisés classés
L’association a commencé à repérer et signaler aux autorités en charge (Communauté de communes) les espaces boisés classés qui méritent d’être inscrits aux documents d’urbanisme. Elle poursuivra cette mission.
4.4. Espèces forestières
Nous voulons ici souligner signaler l’importance des châtaigniers, espèce plus méridionale que le chêne, pédonculé mais aussi sessile, qui prouve sécheresse après sécheresse sa résilience limitée avec de nombreux jeunes arbres morts. La parcelle n°1 des bois du Legs Thénard comportait autrefois de nombreux châtaigniers qui ont été arrachés et remplacés par des chênes. Les châtaigniers ont de nombreux avantages : production de châtaignes, de miel, de bois, intérêt des châtaignes pour le gibier et les autres animaux des bois. Nous suggérons donc d’étendre la plantation de cette espèce chaque fois que possible. Le faux acacia qui prend de l’importance dans nos forêts est une espèce invasive dont la pénétration est favorisée par l’ouverture de routes dans les massifs forestiers, et qu’il vaudrait mieux contenir.
4.5. Chasse
Du fait des particularités du corridor, il n’est pas étonnant que la chasse y soit une activité appréciée. Il est proposé d’en faire un des éléments de valorisation dans le projet de territoire, ce qui suppose d’améliorer la gestion des sols dans un sens plus favorable à la petite faune.
Les sociétés de chasse locales sont et devraient continuer à être associées aux comptages d’espèces, et de manière plus générale à la vigilance sur la biodiversité. Il ne s’agit évidemment pas de construire des « élevages » de gibier.
La fédération départementale des chasseurs sera sollicitée, le moment venu, pour être associée aux plantations de haies ou à l’accompagnement d’une agriculture innovante et écologiquement intensive (voir paragraphe 2 sur le bocage de demain).
5. Une nouvelle relation entre l’homme et la nature
Au-delà de la biodiversité, ce projet de territoire vise aussi à changer les relations entre la population et la nature, que cette population habite le corridor ou les zones urbaines voisines. Les propositions qui suivent répondent à ce double enjeu de protéger la biodiversité et de mieux la valoriser pour les humains. Le corridor peut redevenir « une vraie campagne », c’est notre ambition. Une nature saine et prospère est bonne pour la population qui voit s’accroître son bien-être général !
5.1. Urbanisme et occupation du sol
Le principal objectif du SCOT étant l’aménagement du territoire, voici nos propositions en la matière, dont l’idéal serait qu’elles soient appliquées dans l’ensemble du territoire. Elles peuvent être résumées en une demande : l’arrêt de l’étalement urbain dans le corridor, étalement qui constitue la principale menace pour les habitats, puisqu’elle amène du trafic, des nuisances sonores et lumineuses, des clôtures souvent infranchissables pour les espèces et l’artificialisation de grandes surfaces. Le corridor est proche de l’agglomération de Sens, en développement rapide, et si le corridor doit garder sa vocation, il faut impérativement que ce soit inscrit dans le SCOT.
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5.1.1. Zones agricoles : une préservation sans construction
L’histoire récente a montré que l’étalement urbain venait parfois du changement d’usage de constructions agricoles, ou de cessions de parcelles.
Il est ici proposé que toutes les zones agricoles du corridor soient classées comme ZAP, ou au minimum comme zones A, sous-catégorie « espace de culture » – à l’instar de ce qu’a fait la commune de Villeneuve-la-Dondagre. Les fermes pourraient bien entendu se doter sur leur emprise de bâtiments nécessaires à l’exploitation ou à la première transformation des produits, notamment pour satisfaire le projet alimentaire territorial.
5.1.2. Zones urbaines : de l’extension à la densification
Limiter l’étalement est compatible avec la croissance de la population sous réserve d’une densification de l’habitat. Les communes du corridor souhaitent en effet assurer un dynamisme de leur population et de leurs établissements d’enseignement, donc l’installation de jeunes familles.
L’observation des communes montre que la densité dans les zones urbanisées des villages est en fait très faible, et nombre de bâtiments inutilisés voire à l’abandon pourraient être convertis en habitat pour densifier leurs centres.
Il est proposé que le SCOT donne aux communes plus de possibilités pour reconquérir leurs centres et les dédier à l’accroissement de leur population. Cette densité nouvelle permettrait peut-être de revivifier un petit commerce local que l’étalement urbain a fait disparaître, réduire le trafic automobile devenu inutile et éviter les constructions en zone inondable.
5.1.3. Zones d’activités : pas d’extension au-delà des deux zones actuelles aux carrefours autoroutiers
Le territoire du corridor devrait bien entendu être exempt de toute nouvelle zone d’activité (hors artisanat en centre village) pour conserver sa vocation agricole. Les deux carrefours autoroutiers voisins (carrefour A6-A19 et sortie de la A19 à Fouchères-Subligny) sont bien entendu déjà des zones d’activités, mais ne devraient pas être autorisées à s’étendre dans la direction du corridor. De plus une attention particulière devrait être portée à leurs rejets dans le milieu naturel (notamment la zone logistique de Courtenay-Piffonds) et à la gestion des flux d’eaux pluviales ; nous souhaitons être associés à ces études et travaux.
5.1.4. Pas d’extension urbaine à l’extérieur de la rocade Sud-Ouest de Sens.
Ce contournement ne doit servir qu’à décharger Paron et Gron du trafic routier, notamment de fret, mais pas à urbaniser cette zone. Aucune sortie de cette rocade donc ne devrait être prévue entre Gron et Subligny.
5.1.5. LRV demande à siéger au CDPENAF
L’association souhaite être conviée aux travaux de la Commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers – CDPENAF, qui doit approuver tout changement à la vocation des territoires du corridor.
5.2. Gestion du domaine public
Les collectivités publiques gèrent une grande partie du territoire, et à ce titre l’association propose que certains modes de gestion soient systématiquement adoptés dans le cadre de ce projet de territoire.
5.2.1. Routes
Nous proposons qu’il ne soit plus construit de routes nouvelles, et que les routes actuelles ne soient pas élargies dans le corridor. Les propositions ci-dessus sur l’occupation de l’espace, si elles sont retenues, sont en cohérence avec cette limitation.
L’entretien des routes devrait être poursuivi selon des pratiques favorables à la biodiversité : fauches tardives, création ou maintien de haies et d’arbres. Certaines communes pratiquent déjà ainsi, et l’expérience montre un co-bénéfice significatif pour la sécurité routière, la vitesse étant plus limitée.
5.2.2. Eclairage des voies publiques
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L’éclairage public est une nuisance forte pour la faune nocturne, rapaces et chiroptères mais aussi insectes. Il est donc proposé que tout l’éclairage public dans le corridor soit éteint entre 22h et 6h, selon les recommandations de l’ANPCEN (Association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement). Il est proposé que les communes du corridor signent, ensemble ou séparément, une charte ANPCEN selon les modalités ci-après : https://www.anpcen.fr/?id_rub=96&id_ss_rub=115 . L’expérience montre que les économies générées par ces pratiques sont significatives, permettant de financer d’autres actions environnementales.
5.2.3. Passages pour crapauds
L’abondance de sablières et gravières réaménagées le long de l’Yonne fait de notre corridor un lieu de passage privilégié pour les amphibiens dans leur migration annuelle (pour reproduction) entre les bois et les plans d’eau. Cette migration traverse la D24 en amont de Villeneuve sur Yonne et entre Rousson et Marsangy, ce qui cause d’énormes pertes : 1700 morts en 2016 pour 2500 amphibiens ayant réussi la traversée grâce aux bénévoles qui les ont fait traverser à la main.
L’association participe à ce sauvetage et aux comptages, en partenariat avec la société savante SHNA. Néanmoins cette action est très lourde pour les bénévoles (plusieurs heures chaque soir où la météo est propice entre mi-février et mi-avril, et plusieurs bénévoles chaque soir). Cette année une barrière a pu être posée mais sur un tronçon limité de 500m sur les 4 km concernés au total. De plus la barrière suppose de relever les seaux tous les matins tôt avant le passage des prédateurs.
Il est proposé d’inscrire des projets de « crapauducs » dans ces deux tronçons.
5.2.4. Lignes à haute tension : emprises
Le corridor est traversé par plusieurs lignes à haute tension qui traversent bois et champs.
Le gestionnaire RTE est disposé à convenir avec les propriétaires de mesures de gestion de ces emprises favorables à la biodiversité : lisières étagées, plantation, fauchage, plantation de certaines espèces endémiques, … au lieu de l’habituel gyrobroyage non valorisé qui favorise l’extension des plantes invasives.
Il est proposé que les collectivités propriétaires de bois ou autres emprises conviennent avec RTE de telles mesures.
Il est aussi proposé que les collectivités organisent ou facilitent à cette occasion le contact entre RTE et les propriétaires de terrains situés dans les emprises RTE pour faciliter la généralisation de telles pratiques.
Il est enfin proposé que les collectivités demndent à Enerdis, gestionnaire du réseau moyenne tension, de s’aligner sur les pratiques de RTE en la matière.
5.3. Espaces protégés
Le territoire contient relativement peu d’espaces protégés : seulement une ZNIEFF à Marsangy pour ses pelouses calcaires.
L’inventaire fait en 2013 par le MNHN dans et autour du Legs Thénard a cependant montré un ensemble d’habitats (pies grièches, chiroptères, pelouses à orchidées, pics, affleurements de grès,…) méritant d’être protégés, par exemple par des arrêtés de biotope.
De même plusieurs anciennes gravières au bord de l’Yonne, les zones humides autour des rus ou dans des mares du corridor pourraient mériter d’être classées, en tant que lieu de reproduction des amphibiens.
Il est proposé ici d’intégrer cette réflexion sur le classement de ces zones dans la réflexion générale sur le SCOT. Ces zones méritent protection, même si il n’y a plus de nouvelles zones Natura 2000 et si le classement en ZNIEFF n’a pas d’effet protecteur.
5.4. Valorisation
Le principal bénéfice du projet de territoire est l’agrément des populations qui y vivent ou qui vivent à proximité, les zones urbaines étant desservies en eau et alimentation par ce corridor, et bénéficiant de la proximité de cette nature reconquise. Au-delà, le projet de territoire se veut aussi encourager un développement économique fondé sur des bases nouvelles.
5.4.1. Agriculture
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L’agriculture innovante écologiquement intensive proposée dans ce projet est reconnue comme créatrice d’emplois, à un degré très supérieur à l’agriculture industrielle aujourd’hui dominante. Il s’agit surtout d’emplois locaux non délocalisables, notamment si l’utilisation des produits se fait localement (à l’exemple de la brasserie de Sens).
Il pourrait être ainsi suggéré aux Moulins Dumée de développer une nouvelle ligne dans ses moulins permettant de faire de la farine biologique.
Il est à noter que, le corridor se trouvant à moins de 180km de Paris, toute alimentation en provenant est considérée comme alimentation locale à Paris. Le vaste marché parisien de l’alimentation écologique est une aubaine pour le territoire !
D’autres idées se feront jour, nous l’espérons, dans le cadre du débat ouvert par ce projet.
5.4.2. Tourisme
La région de Sens est propice au tourisme, par la richesse de son patrimoine bâti mais aussi de son patrimoine naturel. En témoignent le nombre de maisons d’hôtes qui fonctionnent, ou l’affluence, inimaginable il y a quelques années, aux balades dînatoires en forêt organisées dans tous les villages une fois par an.
Plusieurs clubs équestres sont aussi une façon de valoriser cette nature.
Les Parisiens qui viennent « à la campagne » dès les beaux jours, viennent pour la campagne, la nature et la détente qu’elles procurent.
Cette vocation touristique pourrait être accentuée par un marketing associant le patrimoine naturel local et ses produits aux infrastructures de tourisme déjà existantes : nombreux monuments, hébergement et restaurants, GR (Chaumot accueille 3 chemins de grande randonnée)… L’identité construite par le projet de territoire peut avoir un effet très attractif et valorisant : en témoigne par exemple la journée de Pentecôte à Egriselles-le-Bocage et l’attractivité des présentations d’animaux qui s’y tiennent.
5.4.3. Pédagogie
Le principal bénéfice du corridor devrait être de faciliter la connaissance de la nature par les jeunes enfants – clé pour les rendre sensibles à l’environnement durant leur vie entière. Les écoles et collèges pourraient être encouragés à organiser des sorties botaniques, d’observation de la faune, des milieux humides, des jeux sur la nature… ou à cultiver de petits jardins.
Le corridor bénéficie de la proximité de deux MFR : celle de Gron, dédiée à l’horticulture et celle de Villevallier spécialisée dans la cuisine et l’agriculture. Le centre d’éducation pour jeunes en difficulté du Legs Thénard (Chaumot) est un autre exemple d’enrichissement de l’éducation par la nature.
Ces deux MFR seraient associées aux actions proposées ci-dessus – celle de Gron les soutient déjà significativement (conférences, ..).
Là encore, le dynamisme des différentes actions envisagées dans le projet de territoire peut apporter une valorisation par la pédagogie. Le marché de l’Ile-de-France est tout proche, des stages ou séminaires peuvent être accueillis localement. D’où l’idée d’une ferme pédagogique à créer sur le territoire, si une équipe (un maître d’ouvrage, un agriculteur) se révèle intéressée.
On pourrait imaginer un accent à mettre sur la botanique, discipline souvent négligée malgré son intérêt.
5.5. Art et culture
Les villes de Sens et Villeneuve-sur-Yonne sont déjà très actives et riches du point de vue artistique et culturel.
Ceci pourrait être renforcé par des initiatives artistiques locales axées sur ou inspirées par le développement durable ou l’écologie et valorisant les zones plus champêtres du corridor, telles que :
– Le voyage d’études des graphistes de l’Ecole Autograf (mars 2017)
– Un festival de cinéma (prévu cette année à Joigny et non plus à Marsangy)
– L’initiative et exposition « Grands Formats » de Gron
– Les premières initiatives locales de Land-Art
– D’autres à inventer.
La synergie avec le développement du tourisme est bien entendu évidente.
5.6. Suivi scientifique de la biodiversité
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Pour assurer l’intégrité du projet de territoire et son efficacité écologique, à la fois pour la prospérité de la biodiversité locale et pour le fonctionnement en tant que corridor, un suivi scientifique devrait être assuré. Il peut l’être par les sociétés savantes locales (SHNA, Station des Mets,…) qui peuvent s’appuyer sur la référence que constitue l’inventaire fait en 2013.
Plusieurs dispositifs au moins peuvent être mobilisés en complément :
5.6.1. Apiculture : les abeilles sont une espèce « sentinelle » de l’environnement ; leur suivi permet de juger de l’état des milieux. Le Club d’Apiculture Warré du Nord de l’Yonne, au sein de l’association Le Ruban Vert, peut déployer un réseau de ruches de biodiversité (Ruches Warré) sur le territoire du corridor et assurer une surveillance de leur état.
5.6.2. Amphibiens : là encore, les actions de protection là où il n’y a pas de crapauducs sont l’occasion de comptages remis à la SHNA.
5.6.3. Autre faune : Un dispositif de surveillance par camera pourrait être installé dans le passage à faune situé sous l’autoroute A19 à Villeneuve-la-Dondagre ; il permettrait de se rendre compte des migrations éventuelles sur le long terme ;
5.6.4. Botanique : L’association Le Ruban Vert inclut un botaniste expert qui connaît la flore locale et peut assurer un suivi des apparitions et disparitions.
5.6.5. Forêt : l’ONF est bien entendu la mieux qualifiée pour faire ce suivi de l’état de la biodiversité dans les zones forestières qu’elle exploite.
6. Gouvernance du projet
Ce projet est une ébauche. Il a vocation à être débattu, si possible approuvé puis à évoluer. Pour ce faire, il peut rester le projet d’une association ; il peut aussi devenir le projet du territoire dans un sens plus large, ce qui suppose des modalités de gouvernance car le territoire ne recouvre aucune collectivité existante, et son objectif suggère que diverses parties prenantes soient associées à cette gouvernance.
Une gouvernance de territoire devrait donc être organisée si le projet est adopté, qui devra fonctionner dans le respect des prérogatives des collectivités et structures existantes et limiter les décisions à celles qui ne relèvent pas de ces décideurs.
La gouvernance pourrait associer des représentants de différents collèges :
Les collectivités publiques :
Les 12 communes
Les 2 communautés de communes
Le département
La Région
L’Etat
Le Syndicat du Legs Thénard
Des représentants des professionnels
Des agriculteurs
Des apiculteurs
La Chambre d’Agriculture
Les professions du tourisme
Les artisans
…
Des scientifiques
La SHNA
Le MNHN/ Conservatoire de Bourgogne
…
Des associations d’environnement
Le Ruban Vert
Des associations d’environnement (LPO, YNE,…)
Des associations de consommateurs
Des associations culturelles
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…
Une réflexion sur des modalités de cette gouvernance sera ébauchée à l’occasion de la présentation de ce projet de territoire aux collectivités et aux autres acteurs.
7. Moyens
Faire vivre ce territoire dans l’esprit décrit ci-dessus demandera des moyens humains et financiers, avant de pouvoir récolter les fruits d’une valorisation nouvelle. Les communautés de communes ont vocation à mobiliser leurs moyens, comme pour tout développement du territoire. Les associations sont là pour les aider à dimensionner les moyens compte tenu de l’ambition et des projets qui seront retenus. Une approche par projet est sans doute à recommander dans un premier temps.
Compte tenu cependant du faible poids démographique de ce territoire par rapport aux communautés de communes et au PETR, un effort particulier devra être consenti, avec par exemple une « Maison du Territoire », une équipe d’animation (1 personne d’abord, puis 2 à 3 personnes), une gestion locale du territoire, un centre pédagogique… Cette équipe sera dédiée à l’ensemble de l’application du projet de territoire.
8. CONCLUSIONS
Ce projet se veut une invitation à réfléchir et débattre, entre les différentes parties prenantes concernées, sur l’avenir de ce territoire au sein du PETR du Nord Yonne.
Il n’est qu’une ébauche, et sera complété par différentes rencontres et réunions avec la population et les responsables locaux durant la procédure d’élaboration du SCOT, en même temps que décliné par commune ou communauté de communes à l’occasion des PLUI.
Il cherche à valoriser les traits originaux du paysage, des habitants et des activités locales, et à en tirer le meilleur parti.
Il ne peut se réaliser sans un consensus largement partagé sur son contenu et ses grandes orientations, et sans qu’un nombre suffisant d’acteurs y adhère.
La procédure d’élaboration du SCOT est l’occasion d’ouvrir ce débat. Si certaines propositions sont dans la continuité de ce qui se fait déjà, d’autres seront jugées plus difficiles, ou de plus long terme. En matière de biodiversité, beaucoup de choses sont irréversibles. L’ambition de ces propositions vise aussi à préserver l’avenir, et à s’assurer qu’aucun développement irréversible ne condamnera les options de valorisation liées à la richesse du patrimoine naturel local.
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Annexe : Propositions pour la gestion conservatoire de la biodiversité du Legs Thénard1
Les quelques éléments qui suivent, n’ont pas pour vocation de se substituer aux différents documents qui régissent la gestion du legs au premier plan duquel figure le plan d’aménagement forestier rédigé par l’O.N.F. Par ailleurs, les propositions font volontairement abstraction des enjeux « économiques » du legs dont l’objectif principal de la gestion est de fournir une rémunération aux orphelins des communes concernées. Enfin, ils découlent d’une analyse partielle qui doit nécessairement être corroborée par des analyses plus fines.
Néanmoins, le caractère très global de ces analyses leur donne une réelle robustesse et peuvent permettre de servir de fondement à une réflexion et à une concertation pour une meilleur prise en compte de la biodiversité au sein du legs.
Les propositions formulées reposent sur les constats suivant :
La faiblesse de la densité de « vieux Bois » au sein du legs
Compte-tenu de la richesse potentielle des sols propices à un développement de la strate arborée, on pourrait légitimement s’attendre à la présence importante d’arbres matures, présentant des traces de sénescence propices au développement d’espèces animales et végétales liées aux vieux bois. Hormis le fait que les boisements ont subis de fortes contraintes notamment au cours de la seconde guerre mondiale, il est patent que la gestion forestière mise en oeuvre actuellement laisse peu de place aux boisements mâtures ou sénescents. Ceci pèse significativement sur la présence et la densité d’espèces dites « patrimoniales ».
La présence d’un réseau de chemins et de pistes très dense
La forêt est parcourue par un réseau de chemins et de pistes forestières très denses qui favorisent une pénétration par l’homme, qu’elle soit motorisée ou non, qui affecte la tranquillité des espèces les plus sensibles (avifaune et mammifères par exemple). Certaines de ces pistes, financées par des crédits européens, présentent un gabarit disproportionné avec les objectifs de gestion et génèrent des emprises importantes sur la forêt. Par ailleurs, les travaux de génie civil mis en oeuvre pour créer ces pistes favorisent très largement l’apparition d’espèces végétales envahissantes.
L’impact des activités agricoles
Les activités agricoles situées à l’intérieur ou en lisière du legs intègrent de façon non satisfaisante la biodiversité. C’est notamment le cas pour les secteurs sur calcaire affleurant particulièrement intéressants sur les plans faunistiques et floristiques. On y constate par exemple et de manière non exhaustive :
– Des stockages de pierres issus des opérations d’épierrement des cultures ;
– Des dépôts plus ou moins sauvage de bois et de matériaux divers ;
– Des mises en culture de parcelles à la productivité douteuse ;
– D’impacts liés à l’épandage de produits phytosanitaires et de pesticides ;
– Une fauche beaucoup trop précoce de parcelle de prairies très importantes biologiquement.
1 Cette partie reprend exactement les conclusions du Service du Patrimoine Naturel du MNHN.
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Une gestion non coordonnée du territoire
Le legs Thénards présente les particularités d’être, d’une part, polynucléaire et, d’autre part, enclavé dans des territoires à caractères naturels qui l’entourent. Ceci signifie que les espèces qui fréquentent ces sites sont en relation étroites avec les territoires voisins et que la notion de « trame verte et bleue » est particulièrement prégnante sur ce territoire. Or, le constat met en évidence une absence quasi-totale de réflexion sur les liaisons écologiques qui doivent être maintenues ou restaurées pour sauvegarder la fonctionnalité écologique des écosystèmes. Ceci se manifeste, notamment, par une urbanisation diffuse qui affecte soit directement les milieux naturel par disparition pure et simple, soit les capacités de déplacement des espèces.
En conséquences des éléments qui précèdent, nous formulons les propositions suivantes :
1 – La proposition de création d’une Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF) de type 1, incluant non seulement les parcelles appartenant au legs, mais également tous les secteurs immédiatement attenant présentant un enjeu pour les espèces dites « déterminantes ». Cette création nous semble particulièrement pertinente compte-tenu de la richesse du site qui se manifeste par exemple, par une densité de Pies-grièches écorcheurs tout à fait importante.
2 – La création d’une « réserve biologique forestière intégrale » au sein du legs, dont la superficie devrait être au minimum d’une centaine d’hectares comme cela est maintenant recommandé par les instructions de l’ONF dans les forêts publiques. L’objectif de cette réserve est de favoriser la présence de vieux bois et de maintenir un témoin de l’évolution naturelle de cette forêt.
3 – L’arrêt de la création de nouvelles pistes et de chemins forestiers. Cette mesure est particulièrement importante pour favoriser la présence d’espèces sensibles aux dérangements (mammifères, rapaces…). Un travail de réhabilitation et d’intégration paysagère et écologique des pistes récemment créées devrait également être mise en oeuvre.
4 – Une sensibilisation des agriculteurs sur l’impact de leurs activités sur les milieux naturels devrait être entreprise. Des financements devraient être recherchés pour mettre en place des contrats favorisant la mise en place de mesure de gestion adaptées et respectueuses de l’environnement. La mise en place de bandes enherbées le long des lisières forestières, déjà en place sur certains secteurs, devrait être généralisée.
5 – Les documents d’urbanismes des communes concernées doivent intégrer la présence de milieux naturels précieux et limiter au maximum l’urbanisation des secteurs sensibles dans les différents documents d’urbanisme qui régissent l’aménagement du territoire. Dans ce contexte, les gestionnaires du legs doivent jouer un rôle moteur pour faire prendre en compte ces enjeux.
En conclusion des éléments qui précèdent, il convient de préciser que ce diagnostic et ces propositions ne doivent en aucun cas être perçus par le gestionnaire actuel comme un jugement ou un désaveu. Rappelons une fois encore que n’avons pris en compte dans nos propos que l’aspect « biodiversité » sans tenir compte volontairement d’autres aspects tels qu’économiques notamment. Nous avons toutefois le sentiment que les mesures que nous proposons ne sont pas un obstacle à une gestion durable tant écologique qu’économiquement viable. Elles visent, en tout état de cause, à instaurer une réflexion et un dialogue qui permettra peut-être d’orienter les choix de gestion futurs dans le cadre d’une concertation renforcée et sur la base d’éléments factuels plus complets.