Trois manches à air vertes flottent au vent au stade d’Egriselles. C’est le début des Chemins d’artistes. Au milieu du parcours, aux Marnières d’Ogny, un mystérieux reflet au bout d’un alignement d’acacias attend le visiteur. Enfin, au cœur du site, un torrent de pierres blanches coupe le souffle. Explications.
Bonjour Cécile Willers, est-ce que tu peux te présenter ?
Je suis artiste peintre. Depuis une quinzaine d’années, nous construisons avec mon mari une maison atelier à Charny, au milieu de la campagne de l’Yonne avec des matériaux trouvés à proximité : l’argile du terrain et le bois de la scierie la plus proche.
Le projet des Chemins d’artistes a tout de suite fait écho à ma manière de fonctionner. Il y a des équilibres à trouver, c’est ce qui m’intéresse. J’essaye de les mettre en œuvre à la fois dans ma pratique artistique et dans ma vie.
Depuis 6 ans, j’enseigne la peinture et j’interviens dans les écoles sur des projets. Enseigner est devenu une deuxième passion.
Décris-nous tes coups de cœur sur le parcours des Chemins d’artistes
Le départ des Chemins, au niveau du stade, est un point haut venteux. Je voulais montrer combien l’air et le vent sont présents dans nos paysages. Avec l’alignement d’acacias à la lisière du bois des marnières d’Ogny, c’est toujours émouvant de voir la trace de l’homme quand il répare. Enfin, la découverte de la décharge de gravats m’a vraiment motivée à m’investir sur le projet.
Comment interviens-tu sur ce site ?
Avec « Le Torrent », l’idée était de transformer la décharge de gravats en un torrent de pierres ! Le projet semblait très ambitieux car impossible d’utiliser des engins dans la pente. Nous ne pouvions compter que sur la force musculaire. Grâce au soutien de Claire Tutenuit, Présidente du Ruban Vert, de l’aide de Christian Deschamps, Maire d’Egriselles, et de Saïd le jardinier, nous avons fait l’impossible, réorganiser la décharge ! Ainsi, dans le lit du torrent, les briques se retrouvent tout en-dessous ; ensuite, il y a les gravats de béton et de ciment, et enfin, sur le dessus, la craie descend tout droit vers nous. L’impression visuelle est une résurgence de craie. La dimension poétique de ce torrent est importante. J’ai voulu faire croire que cela avait toujours été là, avec les végétaux plantés avec Pierre Wisler, membre du Ruban Vert. Un site qui redevient naturel avec la main de l’homme. Humblement, discrètement, pour que chacun retrouve sa place. Un équilibre à trouver en permanence.
Pour « La forêt infinie », dans l‘allée plantée d’acacias, un miroir géant au fond de l’alignement évoque un prolongement sans fin. Il révèle le désir de ne pas interrompre la forêt.
Enfin, en haut des poteaux du stade, « Les Manches à Air » sont un signal de couleur verte qui interroge.
Ces trois projets s’articulent ensemble. Ils évoquent chacun un des éléments du paysage : l’air, le minéral et le végétal. La marche sur les Chemins d’artistes, reliant ces trois interventions, évoque l’expérience de l’homme dans le paysage.
Quel lien vois-tu entre l’art et la nature ?
Le land-art utilise les matériaux de la nature. Dans les trois projets, j’utilise à la fois les éléments naturels et des éléments de récupération. Il s’agit de faire avec ce qui se trouve sur place en y ajoutant une dimension poétique. L’art est certainement ce qui caractérise l’homme. La rencontre de l’art et de la nature se concrétise merveilleusement dans le land-art.
Qui te finance ?
Pas besoin de financement, mais de l’organisation, de la bonne volonté, de l’entraide, de la motivation et de la conviction. Sans toutes ces qualités, rien de possible sur ce type de projet. Il va sans dire qu’il faut aussi donner de son temps.
Qu’est-ce qui t’a séduit dans cette seconde édition des Chemins d’artistes ?
Un projet qui se fait le relai d’une cause juste et ambitieuse portée par une association très investie avec des objectifs cohérents, clairs et nécessaires ont été les facteurs qui m’ont séduite.